mardi 31 janvier 2012

Luang Prabang (27-31 janvier 2012)

Non, Luang Prabang, ce n’est pas Disneyland. Certes, on s’y tromperait, car la ressemblance est frappante : grandes allées aux trottoirs lisses, jolies petites guesthouses coloniales bien proprettes, avec bougainvilliers de toutes les couleurs… C’est tout juste si on ne cherche pas des yeux l’entrée de Small World au bout de la rue ou Mickey au volant d’un tuk-tuk. On est vraiment dans Main Street, avec ses boutiques, ses restos… et ses touristes. A mon arrivée ici, je me suis retenue de gratter aux murs des maisons pour voir si ce n’était pas du carton-pâte. Mais non. C’est bien du solide. Mais alors où sont les gens ? Où est la vraie vie, ici ? Les seuls locaux que l’on rencontre sont les patrons des guesthouses et les serveurs des cafés. Mais qu’est-ce que c’est que cette ville-musée ??

 

Oui, Luang Prabang est ultra-touristique. Mais pas touristique comme tout le monde. Elle a son charme, bien sûr, son cadre magnifique aussi, mais surtout son histoire. Il m’a fallu quelques jours, à me balader, à lire les guides et à discuter avec un petit moine pour comprendre un peu mieux où je me trouvais.

Ancienne capitale royale, un temps délaissée au profit de Vientiane au XVIe et XVIIe siècles, puis de nouveau capitale à l’éclatement du royaume fin XVIIe, la ville subit coup sur coup, au XIXe siècle, le pillage des Pavillons noirs chinois (1887) puis l’occupation siamoise. Trop c’est trop, en 1893, le roi de Luang Prabang demande le protectorat français. Bilan mitigé de la présence tricolore au Laos, mais du côté positif, on notera la reconstruction de Vientiane, complètement mise à sac, et le développement des transports, aussi bien terrestres que fluviaux. C’est de cette période que Luang Prabang hérite de son visage actuel, avec son architecture élégante au milieu des îlots de verdure. Pendant la seconde guerre mondiale, le pays passe sous domination japonaise, avant de proclamer définitivement son indépendance en 1953. Le Laos connait ensuite une période troublée, pris entre la guerre du Vietnam (le royaume est neutre, mais la "piste Hô Chi Minh" -les routes empruntées par les troupes Nord-vietnamiennes pour ravitailler les alliés Viêt Cong   au sud- passe par le Laos) et son propre conflit civil. Les bombardements américains de cette époque, pour tenter de couper la piste Hô Chi Minh, feront un véritable désastre : 3 millions de tonnes de bombes lâchées sur le Laos par les B52, qui dit mieux ? En 1975, le parti révolutionnaire du peuple lao prend le pouvoir. Luang Prabang, alors suspectée de sympathie pour la royauté, est rigoureusement contrôlée. L’électricité pendant la journée, par exemple, ne sera établie que dans les années 1990.
Et puis finalement, en 1995, l’Unesco inscrit la ville à son patrimoine mondial. Et cela change réellement la donne : la ville s’ouvre au tourisme et entreprend de nombreuses restaurations de ses temples et bâtiments historiques. Evidemment, vivre dans un écrin pareil, ça a un prix… que la population locale ne peut plus vraiment s’offrir. Les guesthouses, boutiques et agences de voyages se sont donc progressivement installées dans les jolies petites maisons du centre-ville. 

Alors oui, on peut effectivement voir Luang Prabang comme une réserve à touristes, un décor de film ou une cité-musée. Et il y a un peu de tout ça, c’est vrai. Mais la question est plutôt de savoir si ce joli petit bijou n’aurait pas perdu davantage à rester la Belle au bois dormant qu’à (re ?)devenir capitale culturelle du pays, avec les subventions internationales qui vont avec. Aujourd’hui l’équilibre est fragile. Peut-être est-il entre les mains des touristes eux-mêmes ?

La cérémonie quotidienne de l’offrande de riz aux moines, par exemple, est ici, encore plus qu’ailleurs, la cible des flashs irrespectueux des farangs (étrangers) en short, qui n’hésitent pas à se mêler à la procession, sous prétexte de faire la photo de l’année (la fin justifie les moyens, n’est-ce pas ? Montrez-nous vos clichés, messieurs-dames, et on en reparle ensuite). Il est donc question, ici, d’abandonner cette tradition. Un comble, car côté religion, la ville est l’un des plus hauts lieux du bouddhisme en Asie, et la ferveur, palpable dans les rues, fait partie intégrante de cet ensemble qui plait tant aux touristes. Bref, quelques mètres de distance, le silence à observer… ce n’est pas bien compliqué, et cela ne tient qu’à nous, routards avertis, d’aider la ville à garder son âme.

Ce long préambule étant fait, voici quelques photos, pour vous faire partager mes trois jours ici. Parce que, beaucoup de blabla pour dire quoi ? C’est BEAU !

 
Le premier jour, samedi 28 janvier, de bon matin, je m’offre un petit dej’ de compétition : café au lait, croissant, baguette, jus d’orange et salade de fruits, le tout en lisant la dernière édition du Monde... Ca fait quand même un peu colonial, mon affaire... Je passe ensuite la journée à me balader en ville et un peu en périphérie (pour voir si tout est comme la rue principale, ou s’il y a quelque part des gens qui vivent vraiment !). Je termine la journée en haut du Mont Phousi, qui domine la ville, pour admirer le coucher sur le Mekong. Comme on peut l’imaginer, je ne suis pas toute seule. Le soir, je retrouve Nicolas et Eurydice, un couple de français qui sont descendus dans le même slowboat que moi depuis Houseisai. Nidal, Cynthia et Gaëtan, qui vadrouillent dans le monde entier depuis quelques mois, sont également de la partie. Notre petite French Connection a établi son QG dans un bouiboui sympa, bon et pas cher (tout le contraire de la Citroni Pipo), dont le patron aime bien faire des blagues sur les quantités de bières qu’on prend mais se plante systématiquement dans la commande… un poème.

 
 



Dimanche 29 janvier, je pars en balade sur le Mekong avec Steeve et Marylin, un couple de retraités canadiens hauts en couleur, avec qui je partage le bateau. Le capitaine a une belle voix de baryton-basse, je suis aux anges. Nous visitons les caves de Pak Ou, dans la falaise, avec leurs centaines de bouddhas déposés par les fidèles, ainsi que des villages d’artisans, spécialisés dans le rice whisky, le papier ou la soie… Mais le plus beau reste tout de même la vie sur le Mekong, avec les gamins qui jouent dans l’eau, les pécheurs sur leurs barques, les orpailleurs… Avec la lumière rasante du petit matin ou dorée de la fin de journée, ce n’est vraiment pas mal. Re-soirée déjantée avec la French family, du moins jusqu’à minuit, l’heure du couvre-feu. Et oui, ça ne rigole tous les jours (et toute la nuit), ici… 

 

   




Lundi 30 janvier, en visitant tôt le matin un petit temple, je tombe sur un jeune novice pas timide du tout, qui cherche à parler anglais avec un farang. On papote pendant une bonne heure, du tourisme à Luang Prabang, de son éducation, de son avenir (il veut étudier à l’université pour devenir guide touristique). Echange plutôt rigolo, au bout duquel ça l’a amusé qu’on se prenne en photo. J’ai aussi gagné un petit bracelet couleur safran porte-bonheur, youpi ! J’avais sinon prévu une journée tranquille pour faire un envoi par la Poste (le récit vaudrait un post à lui tout seul, je vous l’épargne), faire encore quelques photos de la ville et m’occuper de mon départ le lendemain pour Nong Khiaw, à 200 km au Nord. Journée très tranquille, donc, qui a aussi eu le mérite de me relaxer pour ma soirée spéciale loose du moment : perte de ma carte Gold, 100 euros dans les dents à cause d’un distributeur capricieux, et un mauvais fruit shake contre lequel ma trousse à pharmacie n’a rien pu faire. Mais, que le lecteur (qui aura eu la patience de lire mon post jusqu’au bout… allez, un point de plus pour les lèche-c…, je vous adore !) se rassure, rien n’altèrerait mon moral, et tout est déjà (presque) rentré dans l’ordre… Bye bye Luang Prabang, mais ce n’est qu’un au revoir, car on se retrouve certainement après mon petit périple vers Nong Khiaw et Muang Ngoi !

7 commentaires:

  1. Si tu voyageais avec une carte orange, d'une part cela ferait plus couleur locale, d'autre part cela ferait moins snobinard, et finalement cela serait moins coûteux ! (Bon mais tu l'as récupéré ta Gold ? Tu voyages aussi avec ta Rolex ?)
    PS1 pour ceux de ta génération (j'imagine la quasi-totalité de tes lecteurs) la carte orange était le nom que l'on donnait à ce qu'aujourd'hui on nomme carte navigo (RATP & SNCF). Signé pépé !
    PS2 Toujours superbes tes photos. Signé Lèche-Q

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    1. Jean-Marc, ton commentaire frise l'insolence, mais tu es mon lèche-Q numéro 1, alors je t'accorde le point.
      Donc, pour la petite histoire(et pour ceux, comme toi, à qui il viendrait à l'idée des pensées désobligeantes), j'ai (j'avais) DEUX cartes, une de riches (la Gold), pour l'assurance, et une de pauvres (la normale), au cas où j'en perdais une. Il me reste donc ma carte de pauvres. Une autre carte de riches devrait me parvenir par la Poste sous 3 semaines, quelque part au Cambodge. Pour les 100 euros perdus, après vérification par les services de la banque, je devrais être remboursée d'ici 3 semaines. Sinon, j'ai donné ma Rolex à un moine pendant la cérémonie des offrandes.
      Et pour finir, Pépé, Navigo, c'est juste la puce. La carte, elle s'appelle Intégrale.

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    2. Tu veux dire que ton sort à l'autre bout du monde dépend de La Poste?... A mon avis donner ta Rolex au moine fut une bonne idée car ses prières ne seront pas de trop ;-p

      PS sinon je voudrais pas passer pour le "fayot du lèche-Q" mais la carte intégrale c'est l'abonnement à l'année, une sorte de carte Gold ;-). Si comme moi tu paies débilement au mois tu as un vulgaire passe Navigo de pauvre. Bon ok je sors... ;-)

      Blague à part bonne chance pour ta carte et continue à nous abreuver d'articles à faire pâlir Paris Match :-)

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    3. Je sais, c'est assez fou, mais j'ai décidé de faire confiance à La Poste pour l'envoi de ma carte ;)
      Pour le Navigo, que veux-tu que je te dise... être fayot du lèche-Q, c'est moche, c'est tout !

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    4. Certes c'est moche mais c'est une fonction avec un haut potentiel de promotion ;-p
      Bon je m'arrête là car vu le froid je dois déjà remettre les moufles au risque de perdre un bout de doigt

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  2. Ils sont bien beaux tous ces moines ! ça me donne envie de porter des drapés orange ! Chez nous, c'est vraiment pas le moment de sortir dans cette tenue, nous gelons sur place à - 9°C et samedi ça descendra à - 11°C !
    Mais nous avons nous aussi un beau ciel bleu ...

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  3. Magnifiques photos ma Marion, comme d'habitude...
    Profite profite profite !
    Jitimtrifir

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